La survie en Vaucluse

On ne peut pas – et on ne doit pas – contempler la survie de la même façon que son contraire, car on ne périt qu’une seule fois alors que la survie doit être répétée à l’infini. Pour survivre, il faut pouvoir bénéficier d’une longue chaîne de non-arrestations, une longue série d’instants où la perte ne s’est pas produite, quelles qu’en soient les raisons. Et elles sont nombreuses, ces raisons. Pour expliquer la survie de quelqu’un, il sera donc nécessaire d’expliquer pourquoi la mort n’a pas frappé cette personne à chaque instant de la guerre. Paradoxalement, on devra chercher les raisons de ce qui ne s’est pas passé, à chaque fois que cela ne s’est pas passé, et cela fera beaucoup de vides à combler.

C’est cette complexité qui fait que la survie est moins bien comprise que la persécution. Il y a peu de sources officielles, mais il y a évidemment eu un bon nombre de témoignages. Il y a les quelques témoignages oraux que nous avons eu la chance de recueillir ainsi que les témoignages du temps de la Libération qui se trouvent en grand nombre dans les dossiers de procédure. Il y a aussi les écrits publiés plus tard. Sans mettre en doute l’authenticité de cette dernière catégorie de témoignages, on peut cependant douter qu’ils soient représentatifs de l’ensemble des survivants, car les itinéraires « ordinaires », qui sont beaucoup plus communs, ont souvent peu d’intérêt littéraire et de ce fait, ils n’attirent pas les maisons d’édition. Il y a aussi les erreurs de bonne foi. Telle personne témoignera à Yadvashem en faveur de justes qui avaient caché sa famille, sans se rendre compte que sa famille était recensée à l’adresse de ces justes et que cela était aussi connu d’informateurs antisémites locaux. Sans diminuer la valeur morale de l’acte de ces justes, on peut douter que cette entraide soit à la base de la survie de la famille qu’ils avaient « cachée ».

La plupart des Juifs du Vaucluse vivaient à découvert. Et pourtant, le taux de survie fut de 78% environ. C’est cette contradiction apparente qui est au centre de notre dernier livre: Vichy, la Pègre et les Nazis. Suivez le lien ci-dessous si vous désirez visionner la présentation où nous donnons un aperçu de nos conclusions. Nous avons présenté ces conclusions le 8 juin 2014 au Musée de la Shoah et Centre éducatif de Skokie (Chicago).

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